Livide rêverie
LIVIDE REVERIE
Ne reverrai-je plus les céladons de l’aube,
Ses parmes et ses gris
Ses flammèches ponceau,
Ne goûterai-je plus à tes lèvres l’aurore,
Ses larmes suspendues au parfum d’acacia ?
Je t’avais rencontré à l’angle de ma vie,
Sous l’aveugle ouragan
Et sur mes roches noires …
L’ouragan s’est enfui,
Emportant le passé comme un grand charognard
Pour enfin le conduire aux mondes ignorés,
Au silence de Mort,
Que l’heure ne trouble plus.
Lors, nous avons dansé au rythme de la flamme
Aux fluides lenteurs
De soie douce et bleutée.
Fragile et conscient,
Mais renaissant pourtant aux plaintes de la cendre,
L’Amour s’est empourpré dans un nuage blond,
Pour élever nos âmes
Jusqu’à l’incandescence …
Comme il dansait l’Amour,
Tournoyant et glissant sur des mots en errance
Aux syllabes mouillées qui parlaient au soleil.
Rossignol ou poète,
Il a chanté l’Amour…
Je le voyais voler,
En smoking moiré aux longs pans de satin
De couleur émeraude.
Ses cils se faisaient longs, tels des roseaux de nuit,
Fleuris de poudre d’or.
Ils bruissaient,
Pour chasser les démons vernissés aux écharpes d’iris.
Ses yeux, prisons de mes rêves perdus,
Abysses du destin,
Défiaient les étoiles.
Nos printemps ont brûlé les jardins de l’été,
Puis l’été s’étirait aux confins de l’automne,
Les pavots jaillissaient des entrailles de l’hiver.
Aujourd’hui cependant, il pleut,
Comme il pleuvait hier,
Comme il pleuvra demain, pourquoi ?
Il plet des poussières de pollen illuminant nos nuits,
Sur nos ailes blessées,
Nos ailes engluées.
