Le regard au tapis et les doigts engourdis Par des mots tamisés, marqués à l'encre grises D'un écrit trop prudent ; ô dis-moi mon ami, Comment peux-tu vouloir tout ce que tu méprises ?
L'histoire n'a pas le temps de juger l'incartade De ce cœur moutonnier au goût de mise en bière, Que tu vends, misérable, en guise d'orangeade Aux trucs et aux machins qui ne s'abreuvent guère !
Que s'est-il donc passé pour que, dans tes entrailles, Le seul feu rescapé soit celui de l'outil ? Prêt à confectionner des habits à ta taille Fichés pour te cacher derrière les singeries...
Te souviens-tu du rire qui pouvait s'éveiller en avance, dans ce rêve à qui on a fait croire, de paupière fermée en paupière fermée, qu'il n'était qu'un vulgaire et sordide cauchemar ?
Ô si pâle Homme Moderne! Victoire des machines ! Esclave menotté à la consommation ! Que tes voeux prisonniers, derrière la vitrine, se libèrent à tout prix des liasses picaillons.
Dieu que l'amour résiste à cet envahisseur et craque devant toi comme un peu de regret ; au nom de la beauté matérielle, tu pleures quand personne ne sait plus vraiment qui tu es.
Alors change d'adresse, et hurle sur les toits que (putain!) tu existes au delà des objets ! Au lieu de présenter celui que tu n'es pas à tous ces coeurs perdus qui voudraient te trouver.
Va donc danser, bénin, la valse des heureux et oublie un instant ce qu'il y a de pire ; ce soir est un beau soir pour tomber amoureux de la vie! Et tant mieux si tu dois en sourire.
Ô ami par pitié que ce beau nouvel an révèle à l'occasion ce qu'il y a de meilleur en toi, et tant pis si tu dois par moment maquiller de tristesse le portrait du bonheur.
Avant de te jeter à nouveau dans le vide d'une résolution qui nasarde tes frères à grands coups de principes... Qu'en disent les timides? ... En ce premier janvier, n'oublie pas de te taire !