J’ai passé tant de temps, entre ces quatre murs, Tant inventé ma vie sans demain pour futur. Il m’a fallu rêver, inventer un décor, Pour enfin m’évader, mettre le nez dehors.
Cela fait si longtemps que ma mémoire s’emmêle. Les souvenirs s’effacent ou s’entassent pêle-mêle. Je n’ai plus rien d’humain si ce n’est l’apparence, Car en volant mes rêves ils m’ont tué l’existence .
Quand les hommes et leurs juges décidèrent de mon sort, Me condamnant ainsi, sans me donner la mort, J’aurais bien mieux aimé que ma vie se termine, Que l’on vienne écraser mon âme de vermine.
Ils se sont dits « cléments » en donnant la sentence. Et j’étais soulagé par autant d’indulgence. Aujourd’hui je regrette cet excès de pitié, J’aurais aimé mourir plutôt que de crever.
Je suis un condamné à mourir lentement, Car la perpétuité n’est qu’un vrai faux semblant. Regardez moi mes frères, il n’y a point de salut, A pourrir dans l’enfer de ce lieu corrompu.
Puis hier ils m’on dit, que tout allait changer, Que je pourrais sortir, trouver ma liberté. Mais il y a quarante ans que je croupis ici, Que le monde extérieur de moi fait amnésie.
C’est bien paradoxal, mais je n’ai plus l’envie, De franchir ce couloir, affronter la sortie. Du jeune homme au vieillard j’ai consumé ma vie, Il est tard à présent pour jouer au repenti.
Mon Dieu si tu existes, aujourd’hui je t’implore Ôte moi du supplice, que vienne enfin la mort. Elle qui ne voulut pas il y a tant d’années, Sur mon front tourmenté, déposer son baiser.
