Mon ami, vous m’avez demandé d’écrire le bonheur Mais je ne sais pas, non, je ne sais pas, J’ai beau chercher dans d’immenses efforts, Des lueurs apparaissent et semblent le décrire Puis, comme lasses, s’évanouissent au creux des ombres, Et je ferme les yeux, je ferme les yeux.
Mon ami, n’est il pas cet instant mystérieux, Cette heure tardive où tout s’apaise et retombe, Ou les mots s’invitent, flânant sur nos lèvres, Et façonnent dans le silence des arabesques Où les secondes qui nous animent suspendent le temps, Et que dans l’ordre des choses qui nous entourent, Ce balbutiement où l’on trébuche et s’égare, Nos consciences s’apaisent et ravivent nos cœurs.
Mon ami, connaissez vous ce pays sans saison Où, comme une absinthe, les langueurs vous enivrent, Où, soudain, dans l’immobilité des choses, Il vous vient ce sentiment étrange de ne plus être. Les odeurs vous échappent et le regard devient intérieur, Alors le bonheur ne signifie plus rien, il s’égare.
Mais je regarderai toujours l’aube naissante Le cœur plein de sagesse, là où vibre son mystère, Et l’enfant dans la tiédeur des jours Ranimant à l’infini ce qui fut.