Abandon
Un soleil gris se lève en ce jour endeuillé ;
C'est avec un soupir, la tête ensommeillée,
Que je tourne la page où se pose mon pied ;
La feuille me renvoie la blancheur du papier.
Un regard alentour, la panique m'emplit ;
Où donc ai-je atterri ? Vite, je me replie
Dedans mes couvertures, au sein de ma folie.
Ai-je omis ce qui fait cette mélancolie ?
Ah oui ! C'est vrai, ma muse. Je l'ai délaissée.
C'est avec son absence que je dois dès lors
Affronter chaque jour qui s'empresse d'éclore.
Quand je regarde au ciel, je n'y vois plus son corps
Qui danse dans le vent, qui chante et danse encore ;
Je ne vois plus son doigt pointé vers l'avenir
Qui me guidais jadis, m'aidant à devenir,
Ce poète inspiré qui, même sans sourire,
Empêchait de ses mots les songes de mourir.
Ah oui ! C'est vrai, ma muse, où est-elle passée ?
L'ai-je abandonnée ma souveraine déesse,
Qui venait chaque soir, et qui de ses caresses,
Me faisait entrevoir un monde de tendresse
Où t'en es-tu allée, divine enchanteresse ?
Sans toi mes jours ne sont qu'un brouillard onirique
Dans lequel je me perds, loin des pensées lyriques,
Loin des rêves d'antan aux échos féeriques ;
Je me perds chaque jour en folies chimériques.
Ah oui ! Ma muse au loin, je l'avais oubliée
Oui, je t'ai délaissée, combien cela fait-il ?
Des mois, des décennies, des siècles inutiles,
Toute une éternité de songes infertiles
Tu m'as fait endurer, infernale et futile.
De mon sang qui coulait de ces plaies, tu mentais
En lettres rouges des mots qui me tourmentaient.
Mais, succube, aujourd'hui, cesse de me hanter ;
Avec toi mon bonheur s'en va, désenchanté.
Ah oui ? Qu'est-ce donc ? "Muse" ne me dit plus rien...