La foule de charognards timides espère Voir surgir là, dans ce coin de savane, Le troubadour disparu hier, Emporté par une tornade de silence Happé par une vibration d’Enfer.
Les hautes herbes dissimulent L’éclair craintif de l’animal Qui fuit un sphinx avide ; Mais il ne peut éviter la griffe d’automne De la lionne ; jet rouge.
Une goutte d’aube a glissé Sur une brindille Qui a crépité, s’est enflammée, A fait fuir la gazelle amoureuse ; Pour finir noyée dans le soir jaune.
La montagne posée sur le désert vacille Et se repose, lasse du regard étranger Qui sans cesse souille sa carcasse ; C’est décidé : cette nuit, elle basculera De l’autre côté de l’horizon.
L’animal est dévoré ; La brousse est brûlée ; La montagne est partie ; Et la foule de charognards N’en peut plus de rêver.
Mais au loin résonne, Dans le creux d’oubli d’une falaise, Dans la faille amorphe des collines, Dans le chaos — fraîcheur — d’une cascade, Le chant du troubadour.