Je suis venue céans te parler de la mer Des rochers qui frissonnent Des mouettes qui chahutent Du lion de pierre là-bas qui ouvre grand sa gueule De la chaise oubliée qui attend la marée Des baigneurs solitaires Des douves d'un château arquées à coups de pelle Des enfants qui courent et réclament à goûter Du sable sur les chevilles Du soleil dans le cou Des colonnes de puces qui s'ensablent à cœur joie D'une femme qui marche jusqu'au bout de la plage
Je suis venue céans te parler de la mer Où tu ne viendras pas Dont tu ignores tout Du sel sur la langue Du coupant des roches dont il faut se méfier De ses reflets de pluie quand elle est irisée De ses deux visages, le creux et le trop plein
Je voudrais t'inviter à y venir un jour Sans besoin de personne pour t'y accompagner Ton ombre aura grandi et couvrira la mienne Peut-être celle-ci sera-t-elle effacée
Si tu plonges ton regard dans mes orbites sombres Des voiles surgiront du bout de l'horizon Et le vent sous la barre les conduira vers toi Auréoles de murmures sans grincements de dents Joyaux sertis de naufrages Où les sirènes sorcières jouent dans les ouragans