Derrière le portail du jardin Se tient un homme Sur le trottoir de nuit Les lumières des guirlandes N'éclairent pas la scène Il reste hors-champ
Le ruban végétal lui fait un appui L'homme y pose son dos On dirait qu'il guette le son Les images à travers le grillage Qui quadrillent
L'homme fume Glisse sa main dans sa poche Se gratte la tête Se frotte le visage
Un air de violon Et il a disparu Envolé ? Effacé ? Effrayé ? À sa place, sur l'asphalte encore chaude du jour Des cohortes de phares vrombissants Dans la nuit Balaient les visions
Soleils et ombres entre nous Faisceaux
Sur la table basse Une fiasque d'alcool jaune Une fiole de jouvence Le citron a pris des degrés Les gorges s'échauffent On parle émotions, intellect, coeur et tête D'où ça vient et où ça va Ou pas Les paroles s'embrouillent Pas les amitiés
Les amis restent assis Au coin du canapé Les langues longuement lapent Le liquide sucré
La maison dort Encore Ne pas faire tinter les couverts Tirer lentement le tiroir Compter mes gestes Encore Éviter les bruits qui clicaillent Ce n'est pas un régiment Préférer le confus Le diffus L'étoupe de nuit est encore posée Sur l'oreiller Un courant d'air pourrait la faire s'envoler
On pourrait se croire en forêt Quelque part pas loin de Québec La maison de bois Derrière le chêne Et juste sa fenêtre Fermée La maison, je n'ai pas envie de la voir davantage Je préfère la deviner La maison en planches ajustées La maison de bois que je ne vois pas Ou à peine Son oeil unique me suffit Je l'observe Elle peut-être aussi Nous sentons nos présences
Entre nous, une palissade enchevêtrée de feuilles Elles ont pris toutes leurs aises Les feuilles Elles ne voudraient pas qu'on les déloge Elles regimbent à rentrer dans le rang À se tenir bien droites Elles entrent en reptation