Grand-mère tu franchis le seuil de ta demeure dont les murs sont de terre le toit gravé de pierre où la nuit est constante sans besoin de lumière qui repousse les peurs où la nuit enveloppe de sa cape les morts dont les os sont gelés
Tu prends refuge ici pour un temps qui n'est autre qu'entière éternité La porte est fort étroite Il te faut te courber vider tes poches pleines serrer tes hanches sèches et quitter tes souliers marcher du bout des pointes mincir comme ton ombre et rejoindre les mousses parsemées des étoiles de ce ciel inversé
Grand-mère je te tiens jusqu'où je peux aller Après c'est impossible sauf si par les pensées les souvenirs-racines que nous avons ancrés sans craindre qu'ils s'échappent Je les porte en écharpe pour ne pas te quitter
Grand-mère je te berce comme l'enfant que j'aime et que tu fus jadis dans les bras de ta mère Je caresse ton âme et ma main dans la tienne avant que je ne prenne le chemin du retour
Saute le pas, grand-mère Garde-toi de chuter La pente est très glissante Tu pourrais te blesser et vas dormir là-bas Je chante à tes côtés
Je voudrais tant grand-mère ne pas pleurer ce soir et plutôt t'amuser En serai-je capable ?