Je me souviens d’une mèche de tes cheveux soyeux d’enfant gisant dans un cœur miniature serti d’or Je me souviens de tes pas hésitants sous tes jambes flageolantes quand tu voulais attraper mes mains Je me souviens de cette photo où tes yeux écarquillés buvaient toute la lumière du ciel immense Je me souviens de toi comme l’éternelle enfant blottie pour l’éternité dans l’écrin de ma mémoire blessée Je me souviens de toi devenue immobile minuscule retenue sur un lit de coton blanc sans suite Je me souviens de mes aiguilles cliquetant sans relâche des mailles serrées pour endormir ta vive frilosité Je me souviens de ton visage lunaire qui s’amusait d’un moins que rien dans la nature bruissante Je me souviens du grand vide noir de l’absence à laquelle nous ne voulions pas nous résoudre Je me souviens de ta venue soudaine sur terre au cœur du printemps où tout nous enchantait Je me souviens des jours d’anniversaire où l’on piquait des feux numérotés sur le dos d’un gâteau Je me souviens de tes mains marionnettes qui dansaient en plein vol devant tes yeux grands ouverts Je me souviens des plaisirs envolés quand l’enfance se défait de ses étonnements tombés dans le silence Je me souviens des mots inattendus que tu lâchais soudain sans retenue dans une salve de souffle Je me souviens de tes brusques colères effacées par tes éclats de rire qui apportaient le pardon Je me souviens des endormissements où tu te blottissais pour repousser tes craintes tassées dans la nuit