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Véronique PEDRERO

Sur le bord de l'île

Il se contorsionne
Emberlificoté dans les fils du mensonge
Déjà
Il tord se pattes de tisons ligneux
Dans la guipure intestine
Il retrousse ses mains en tenailles
Il voudrait faire ripaille

Il baille
Il bataille
Il hennit

Elle croit entendre les cloches brailler
Mais c’est son ventre
Elle croit entendre déglutir la fosse septique
Mais c’est son ventre
Elle plonge les mains dans son vagin
L’enfant la voit venir
Il se recroqueville pour qu’elle ne le trouve pas
Il étouffe son cri quand il sent sa main putride
Tout près

Il tressaille

La femme sort ses mains
Elle les essuie sur ses cuisses
Sur son tablier
Ses doigts sont rouges de merde
Elle ne comprend pas où ils étaient partis
Sans permission

L’enfant a eu chaud
Il a eu peur de sortir trop tôt
Il appelle l’oiseau
Pour la divertir
Elle
La femme

L’oiseau s’approche
La femme voit ses pattes palmées
Et son bec
Jaune
Elle frissonne
Remonte son châle sur ses épaules
L’oiseau s’approche
L’enfant voit son œil rond
Et la ronde de ses pattes qui tracent
La femme voit aussi les cernes tracées sur la terre
On dirait que des ongles l’ont griffée

L’enfant se suspend
Il est en apesanteur
Il voudrait que l’oiseau colle son œil sur le sien
Mais il a peur
Il a peur que la mère ait peur
Il flotte jusqu’au bord du sein
Et il se pose

La mère respire
Elle laisse l’oiseau venir
Elle laisse l’enfant regarder l’oiseau
Elle regarde son ventre
Elle pose ses pulpes