Près d’un petit jardin aux paisibles senteurs Grandit sereinement un prince verdoyant ; Les racines ancrées dans un sol accueillant Il se laisse bercer par des sons enchanteurs.
Fort et majestueux au milieu des fruitiers Il dresse son chapeau vers l’empire céleste ; Il sait qu’à tout instant un orage funeste Pourrait sans un égard nuire à son port altier.
Mais il est courageux, parfois même audacieux, Car il ose affronter les terribles tempêtes Qui soufflent leur colère au-dessus de sa tête Et décoiffent les toits qui nous servent de cieux.
Lorsque revient le cers ou son cousin l’autan Sa tête est menacée par trop d’emportement Et ses bras balancés, dans un grand bruissement, Font entendre les chants de son cœur occitan.
Lorsque les airs se muent en un souffle plus sage Il déploie à nouveau son auguste voilure Et offre élégamment sa sublime ramure Aux oiseaux attirés par son tendre feuillage.
Eole quelquefois met des gants de velours Pour caresser mon chêne avec plus de douceur ; Je peux alors goûter son ombre et sa fraîcheur Et me mettre à rêver sous ses plus beaux atours.
Certains l’ont dénigré pour flatter le roseau Qui plie mais ne rompt point selon certaine fable ; Le plus brave des deux et le plus respectable Est celui qui combat les ardeurs du bourreau.
Abdiquer sans lutter contre l’adversité C’est accepter sans fin le joug de son rival ; Attaché au terroir dont il est le féal Mon géant peut grandir dans la sérénité.
Aujourd’hui rayonnant, insensible à l’hiver, Il m’offre sans compter sa force et sa noblesse ; Ce délicieux joyau que mon regard caresse Croissant dans mon jardin est un beau chêne vert.