Entre les herbes folles du Monde et moi, Prenant de vitesse le Temps immobile Ou le bonheur qui tarde - il y avait toi, Cherchant pour tes fantômes : un asile
Toi qui rêvais d'amour plus profond qu'un puits, De minutes heureuses assignées en résidence Avec une poignée d'étoiles entre deux nuits, Ton âme ne pèse plus lourd, à l'évidence !
Ton univers, que je voyais par moments Se métisser avec le bleu absolu du ciel, S'est peu ou prou réduit à deux éléments : L'air qui vient à manquer, éther artificiel Auquel on prête un nom - ou qui persiste Comme un coucher de Soleil sur la mer, Et cette opacité douteuse qui résiste Sous l'astre obscur du souvenir amer
Sur ces hauteurs inaccessibles que je vois Au loin - le toit des sentiments se raidit, La lumière t'éclaire encore, je t'aperçois Sortie d'un miroir où tout se contredit, Escaladant par l'envers tes propres désarrois Sur la pointe des pieds - la brume tragique Créant sur ta peau une nouvelle glaciation Parce que, promise à une tristesse algique, Tu te perds dans le noir et la renonciation
Tes mots, doux secrets, demeurent cachés Au fond des eaux stagnantes de ta vie, Là où tes maux doux se créent, arrachés Au grenier à chagrins et instinct de survie Puis décalquent sur nous leur violence, Quand tu parles et que je cesse d'écouter : J'entends le bruit que fait le silence Qui occupe le vide mais, sans l'habiter
Et sans le vouloir, on laisse les saisons Se suivre, nostalgiques de rares et brèves Tentatives d'aimer ; parfois nous faisons Pour nos yeux naïfs : une salve de rêves Où, sur tes joues corrodées par les pleurs Je me surprends toujours à oser déposer, Planter comme des banderilles : des fleurs, Un regard gêné ou encore, un baiser.