Un jour, je me suis dit : « poète, à quoi sers-tu ? » Peu enclin à laisser les questions sans réponses, J’ai accordé mon luth ; je me suis revêtu D’éclairs brillants, d’or et métaphores absconses !
Je trace désormais des vers à tout moment ; Et c'est tantôt Gaieté, tantôt Mélancolie, — Ou les deux à la fois, mêlées intimement — Qui berce de ses chants ma légère folie !
C'est l'oubli consenti et c'est l'amour vainqueur Qui tombent à propos, lorsque, d'un trait j'exprime En langage imagé ce que j'ai sur le cœur : Plaisir éprouvé, spleen, ou désespoir ultime
Mais, mon spleen... C'est bien tout ce que j'emporterai Le long du grand chemin vers la Nuit éternelle, — Lorsque viendra mon tour... Enfin... Quand je mourrai — Lavé de tout orgueil ; dans la paix solennelle !
Parce qu'il n'est pas dit que mes vers survivront !
Qui voudra évoquer ma pauvre âme enterrée, (Tout aimé que je sois) quand au Ciel s'en iront : Rimes fières, mots blancs, écriture éthérée ?
Ah ! Sur ma tombe, alors, mes amis me diront : « Quel don as-tu reçu, pour se faire confondre En des nimbes ardents, les moiteurs de ton front ? »
Seul, peut-être, un poète aurait su leur répondre.