Alignés les uns sur les autres au garde-à-vous Je passais en revue ces bâtons dénudés Les bras alignés épaule contre épaule Déjà saignés à l’automne jauni. Tous me regardaient passer de leurs yeux restants De la bataille des sécateurs, de pas malheureux, Et malgré leurs droitures dans cette terre clairsemée Ils me faisaient penser aux croix de combattants Délivrés d’une guerre jamais comprise. Les sarments étaient regroupés en tas Au bas de chaque pied prêts à être brûlés : Le résultat de soldats démembrés, greffés, Dans l’équanimité d’un paysage d’après guerre. Les vignes percluses à la rectitude bucolique Me saluaient en silence sur le rai d’un soleil oblique Où un brin de chaleur ravivait la force De voir au printemps prochain les pampres joyeuses. Au regard du mamelon religieux élevé au plus haut Les souvenirs s’envolent au-dessus des chiens assis Dans un ciel où les vapeurs agrestes voilent le lointain A la lumière vespérale lasurée de ses ceps.