L'automne est là, lâchant bride à son vent Qui fait glisser sur la terre asséchée L'ombre flétrie des voiliers en tourment, Chargés de pleurs,sur la mer ébréchée D'un ciel qui fuit sous le regard éteint D'un soleil froid ayant perdu son teint. L'or des forêts n'est que rouille volante. Les arbres noirs s'enlacent les rameaux. A leurs pieds nus,dans une boue collante, Les champignons exhibent leurs chapeaux.
L'automne est là,dans sa soutane grise Qui fait s'enfuir les papiers des chemins. Le soir, pressé,vient étendre sa prise Sur les taudis pullulant de gamins. Dès le coucher,les cafés sont déserts Chacun chez soi, tous les jeux sont ouverts! Télé par–ci:un film où l'on se pince, Où l'on se tue pour un argent pourri; Par là,on dort;ailleurs un vieux lit grince A la lueur d'un bon feu bien nourri.
L'automne est là,un rimeur solitaire Entend glousser sa muse de plaisir. Un dizain naît sur la page qu'éclaire Un bout de fil s'apprêtant à périr. L'encre en coulant trace un ru dont la rive Est le berceau de la rime pensive, Croisant sa sœur,la prenant dans les bras, Ou la suivant,de très près,en silence, Les deux trottant, main dans main,pas à pas Marche rythmée, agréable cadence .
L'automne est là,parsemant les marchés De ses fruits d'or au jus nommé Délice. Presse qui veut!Ces flots tant recherchés Sont là, en tas,et prêts à tout supplice Pour plaire au bec d'un humain miséreux Comme à celui de ceux qu'on dit heureux. La fée s'endort, sur sa lèvre un sourire. Son bâtonnet mort mâche ses rubis Un rideau bleu marqué "fin de délire" Ensevelit l'homme et ses vieux habits.