Quand je ferme les yeux, ta silhouette vient Se promener sous mes paupières. J'entends ses pas, ses petits cris. Mon cœur retient Ses soupirs. Tes brunes crinières Font mon âme frémir. T'ouvrant ses pavillons Pour que s'y blottissent tes grâces, Elle tombe à tes pieds dont les doux carillons Des bracelets rendent bonasses Ses baisers répétés, tantôt sur un anneau Et tantôt sur une cheville. Tu t'enfuis ; mon regard te suit, tel un agneau Qui, dans un pré fleuri, sautille. J'ouvre les yeux. Ton ombre est là qui me sourit. Je tends la main. Elle s'envole, Me laissant ce parfum dont se nourrit l'esprit Epris des rais de son idole. «Ta plume a soif. Abreuve-la ! » me dit ta voix Du haut des cieux. Naît un poème Aux vers bordés de fleurs, rimés comme autrefois, Au clair d'un foyer qui parsème D'étincelles en or, en tous sens voltigeant, Le ru des mots qui désaltère Le papier sec. Ma main de maître diligent En caresse un coin. Quel mystère Guide ce bout d'oiseau dont abondent les pleurs En labourant la page inerte Sous l'œil d'une bougie aux blafardes lueurs Faisant face à la nuit déserte ? Sans doute, cet éclair qui jaillit quand le soir Engloutit gites et parages Pour la paix d'un rimeur dont le vieil encensoir Parfume peu les labourages.