Elle apparut dans sa tente couleur de suie. Un gros nuage ocré volait à ses pieds Que l'on ne pouvait voir labourer les sentiers Mais dont on entendait les grelots en furie.
Deux étoiles sans fard scintillaient dans ce ciel Hivernal, taillé dans une mine de houille: Ses yeux dont le khol a recouvert de sa rouille Le blanc où nage un iris à l'éclair mortel.
Quels appas cachait cette nuit au parfum d'ambre? L'œil presqu'éteint d'un fou rimeur abasourdi Que les ans, longs et inféconds, ont étourdi Partit explorer les trésors de la belle ombre.
Deux monts sans bois par-ci, un frais vallon par-là Un pré,puis un jardin,une verdure soyeuse, Dans un ravin,une source offre son eau laiteuse. Edénique oasis de rêve au calme plat!
"Etanchons,se dit-il, notre soif séculaire; Caressons l'or de ces dunes aux reflets bleus Qui s'embrassent le soir sous la bure des cieux Les couvrant de leur charmant sourire lunaire.
Un petit vent,tel le souffle d'un ange ému Par ce tableau vivant,fit voler le haïk-voile. Des ténèbres jaillit un genou; puis, la toile Se referma,sans bruit,sur son monde inconnu.
Un cri d'oiseau vint ramener sur cette terre Le rêveur stupéfait qui se mit à chercher, En vain,la silhouette ayant son cœur fauché En ce soir de juillet tamisant sa lumière.
Une image est pourtant restée:la main tenant Les pans volant à l'air et ses dessins rougeâtres Rappelant un passé chargé d'envols folâtres Au goût des nuits où l'amour était avenant.
Souvenirs assombris dans les bras de Tristesse, Nourrice au sein givré, mais combien généreux, Pourquoi surgissez-vous en ce vieux miséreux Voyant tari le lac où nageait Allégresse?
Allez-vous-en, partez! Restez dans vos caveaux Les jours ont tout blanchi. Fini le temps propice Aux jeux secrets. Le fiel a noyé leur délice Dans son lugubre étang aux suffocantes eaux .