Je me vois et me reconnais de loin Je ne suis plus très fraîche à vrai dire plutôt en friche Mon corps fut fin et ferme Aujourd'hui il porte la pesanteur du temps et la lourdeur des peines, lesté par les souffrances, ramolli par les coups à l'âme Le laisser aller à largement devancer le lâcher prise et il a été un peu laissé à l'abandon
Mon corps est femelle, maternelle, malgré tout sensuel Ma peau est douce bien que mon visage ait été atteint par la petite vérole des larmes mais si j'ai quelques rides elles furent construites à coup de rire, creusées dans la moue et me rendant joviale Je ne suis ni belle ni laide Je suis à l'image de mon histoire Un peu ravagée mais touchante et parfois charmante Je suis ce que je suis Je suis une femme Botero
Grosse et l'aide Appétissante et gourmande Plus ni pomme verte ni dorée Plutôt rouge et sucrée Juteuse et généreuse Encore loin d'être blette Je suis le pêché d'Adam Qui invite à croquer Pour entrer en conscience Dans l'inconscience par la chair
Entre les courbes et les déliés Au gré des pleins et au creux de mes vides Je suis une écriture couchée sur des draps blancs Graphique à la baroque Hiéroglyphes à déchiffrer Par l'esprit, le cœur, le toucher Je raconte des histoires Je raconte une histoire Je raconte mon histoire A qui sait la lire Un récit, una Sagrada Familia Sans fin, sans limite, intemporelle
Je suis la femme Botero, ronde comme la pomme et peinte tout en nuances, juste un chef d'œuvre en somme