Le beau jardin fleuri de flammes Qui nous semblait le double ou le miroir Du jardin clair que nous portions dans l'âme Se cristallise en gel et or, ce soir.
Un grand silence blanc est descendu s'asseoir Là-bas, aux horizons de marbre, Vers où s'en vont, par défilé, les arbres Avec leur ombre immense et bleue Et régulière, à côté d'eux.
Aucun souffle de vent, aucune haleine. Les grands voiles du froid Se déplient seuls, de plaine en plaine, Sur des marais d'argent ou des routes en croix.
Les étoiles paraissent vivre. Comme l'acier, brille le givre, A travers l'air translucide et glacé. De clairs métaux pulvérisés A l'infini semblent neiger De la pâleur d'une lune de cuivre. Tout est scintillement dans l'immobilité.
Et c'est l'heure divine, où l'esprit est hanté Par ces mille regards que projette sur terre, Vers les hasards de l'humaine misère, La bonne et pure et inchangeable éternité.