Des nuages, couleur de marbre, Volent, à travers le ciel fou ; " Eh ! la lune, garde à vous ! " L'espace meugle et se déchire. Sous l'écorce par les fentes On écoute pleurer et rire Les arbres.
" Eh ! la lune, garde à vous ! " Votre face de cristal blanc Va choir, morte, parmi l'étang, Cassée aux angles des vaguettes ; Les taillis plient comme des baguettes ; L'ouragan pille aux cabanes cognées Le chaume immense, par poignées.
C'est les noces du vent et de l'automne. " Eh ! la lune, garde à vous ! " Le vent est ce cavalier lourd Qui s'est soûlé, ce soir, et fait l'amour A tous les coins des carrefours Avec la rouge et violente automne.
" Eh ! la lune, garde à vous ! " Votre allure de sainte Vierge Et vos étoiles et vos cierges N'ont rien à faire en cette heure de fête, Où l'automne et le vent perdent la tête.
Par les taillis, les chiens maraudent, Une odeur lourde et chaude Grise la plaine et redresse debout Le rut universel qui monte et s'enfle et bout Dans les fureurs de la campagne en rage ; Avec l'automne ivre et sauvage De l'Est à l'Ouest, du Sud au Nord, Le vent houleux s'accouple à mort. " Eh ! la lune, garde à vous ! " Les chiens hurlent comme des loups !