Dans la brise ailée et sonore S’éveillent les dieux bocagers ; Et le chalumeau des bergers Brode de ses accords légers Le voile rose de l’aurore.
Tircis aux pieds d’Églé dit son âme amoureuse. L’air est bleu ; la rosée étincelle aux buissons ; Le ruisseau d’argent clair brille dans les cressons, Et le chien noir a l’oeil sur la brebis peureuse.
Sur ses pipeaux Tircis à la Journée Heureuse Prélude ; mais soudain, jalousant ses chansons, Églé veut à son tour, par d’aimables leçons, D’une haleine qui chante emplir la flûte creuse.
Inhabile, elle souffle, et, penché sur son cou, Tircis lève, descend ses doigts sur chaque trou, Et les maintient crispés sur des accords moroses.
Églé s’irrite ; alors, Tircis pour l’apaiser Sur sa bouche vermeille appuie un long baiser ; Et la flûte à leurs pieds roule parmi les roses...
Dans la lumière qui recule S’endorment les dieux bocagers ; Et le chalumeau des bergers Suspend ses accords prolongés Au voile bleu du crépuscule.