Jeune fille, ton coeur avec nous veut se taire Tu fuis, tu ne ris plus ; rien ne saurait te plaire. La soie à tes travaux offre en vain des couleurs ; L'aiguille sous tes doigts n'anime plus des fleurs. Tu n'aimes qu'à rêver, muette, seule, errante, Et la rose pâlit sur ta bouche mourante. Ah ! mon oeil est savant et depuis plus d'un jour, Et ce n'est pas à moi qu'on peut cacher l'amour. Les belles font aimer ; elles aiment. Les belles Nous charment tous. Heureux qui peut être aimé d'elles ! Sois tendre, même faible (on doit l'être un moment), Fidèle, si tu peux. Mais conte-moi comment, Quel jeune homme aux yeux bleus, empressé sans audace, Aux cheveux noirs, au front plein de charme et de grâce. Tu rougis ? On dirait que je t'ai dit son nom. Je le connais pourtant. Autour de ta maison C'est lui qui va, qui vient ; et, laissant ton ouvrage, Tu cours, sans te montrer, épier son passage. Il fuit vite ; et ton oeil, sur sa trace accouru, Le suit encor longtemps quand il a disparu. Nul, en ce bois voisin où trois fêtes brillantes Font voler au printemps nos nymphes triomphantes, Nul n'a sa noble aisance et son habile main A soumettre un coursier aux volontés du frein.