Ne mêle pas l'esprit aux choses de la chair. Sache, aux moments secrets où le corps est en fête, Redescendre à l'obscur délire de la bête. Tumultueux et sourd et fort comme la mer, Laisse gronder tes sens en orgues de tempête, Et que sous l'onde en feu de tes baisers halète L'orgueilleuse impudeur de la beauté parfaite. Il faut qu'au fond des soirs lourds et silencieux Où la bouche à la bouche enfin veut être unie, Tu puisses concentrer tout en toi l'harmonie Qui fait chanter le char des nuits sur ses essieux, Que l'éternel effort des êtres t'aide à vivre Au delà du désir humain, que ton sang ivre Murmure comme l'eau, les blés et la forêt : Emplis-toi, comme un broc qu'on plonge au puits, d'un trait ; Alors la nuit d'amour éteindra ta pensée, Ta chair que la nature étreint en épousée Bourdonnera sans fin d'une immense rumeur : Sois simple et grand ; ton grain porte un monde, semeur ! [...]