Mon ami, vous voilà père d'un nouveau-né ; C'est un garçon encor : le Ciel vous l'a donné Beau, frais, souriant d'aise à cette vie amère ; A peine il a coûté quelque plainte à sa mère. Il est nuit ; je vous vois... à doux bruit, le sommeil Sur un sein blanc qui dort a pris l'enfant vermeil, Et vous, père, veillant contre la cheminée, Recueilli dans vous-même, et la tête inclinée, Vous vous tournez souvent pour revoir, ô douceur Le nouveau-né, la mère, et le frère et la soeur Comme un pasteur joyeux de ses toisons nouvelles, Ou comme un maître, au soir, qui compte ses javelles. A cette heure si grave, en ce calme profond, Qui sait, hors vous, l'abîme où votre coeur se fond, Ami ? qui sait vos pleurs, vos muettes caresses ; Les trésors du génie épanchés en tendresses ; ... Vivez, soyez heureux, et chantez-nous un jour Ces secrets plus qu'humains d'un ineffable amour ! [...]