" Nous voici. Dans le ciel naît l'aurore nouvelle, La mort s'efface, Enfant, et le malheur n'est plus, A travers les airs bleus, de l'éclair de nos ailes, En foule auprès de toi nous voici revenus.
Regardé, Ève divine, écarte tes mains pâles De ton visage plus doux que l'aurore, vois, Nous nous tenons comme une troupe triomphale, Debout dans la lumière entre la Mort et toi.
La porte de l'exil du Paradis est close ; Sur elle et sur son seuil, il flotte doucement Un voile d'ailes blanches et de blanches roses ; Tout l'air n'est qu'un parfum et la brise qu'un chant.
De cet oubli d'une heure il n'est rien qui s'étonne. L'âme la plus heureuse est si lasse parfois ! Reviens. L'erreur était humaine ; Dieu pardonne. Le Paradis entier t'attend comme autrefois.
En ton absence tout a gardé l'attitude De l'immortel instant divin où tu passas ; Tout rêve encor, les eaux, les bois, la solitude, Le beau rêve que ta présence lui laissa.
C'est une amère paix que l'éternel silence, Le sombre sommeil donne aux yeux à jamais clos ; Chants et silence, ici, s'enlacent et la Danse S'appuie, agile et blanche, au souriant Repos.
Et c'est la vie ! Elle est la volupté suprême Du Paradis ; la terre en fleur où elle choit, Se désaltère en elle, et le Rêve lui-même A sa fontaine tend sa coupe d'or et boit.
Mais tu lèves les yeux et souris. Nos paroles Vont se taire devant ta plus simple chanson, Car revoici l'Eden. Dans les airs déjà vole Le souffle qui l'annonce et son divin frisson.