Je vivois mais je meurs, et mon coeur gouverneur De ces membres, se loge autre part : je te prie Si tu veux que j'acheve en ce monde ma vie, Rend le moy, ou me rens au lieu de luy ton coeur.
Ainsi tu me rendras à moy-mesme, et tel heur Te rendra mesme à toy : ainsi l'amour qui lie Le seul amant, liera et l'amant et l'amie : Autrement ta rigueur feroit double malheur.
Car tu perdras tous deux, moy premier qui trop t'aime, Et toy qui n'aimant rien voudras haïr toy mesme : Mais, las ! si l'on reproche à l'un et l'autre un jour
Et l'une et l'autre faute : à moy qui trop t'estime, A toy qui trop me hais, plus grand sera ton crime, D'autant plus que la haine est pire que l'amour.