Pleine de langues et de voix, Ô Roi le miracle des rois Je viens de voir toute la terre, Et publier en ses deux bouts Que pour la paix ni pour la guerre Il n'est rien de pareil à vous.
Par ce bruit je vous ai donné Un renom qui n'est terminé, Ni de fleuve, ni de montagne, Et par lui j'ai fait désirer A la troupe que j'accompagne De vous voir et vous adorer.
Ce sont douze rares beautés, Qui de si dignes qualités Tirent un coeur à leur service, Que leur souhaiter plus d'appas, C'est vouloir avecque injustice Ce que les cieux ne peuvent pas.
L'Orient qui de leurs aïeux Sait les titres ambitieux, Donne à leur sang un avantage Qu'on ne leur peut faire quitter Sans être issu du parentage, Ou de vous, ou de Jupiter.
Tout ce qu'à façonner un corps Nature assemble de trésors, Est en elles sans artifice : Et la force de leurs esprits D'où jamais n'approche le vice, Fait encore accroître leur prix.
Elles souffrent bien que l'amour Par elles fasse chaque jour Nouvelle preuve de ses charmes : Mais sitôt qu'il les veut toucher, Il reconnaît qu'il n'a point d'armes Qu'elles ne fassent reboucher.
Loin des vaines impressions De toutes folles passions, La vertu leur apprend à vivre, Et dans la cour leur fait des lois Que Diane aurait peine à suivre Au plus grand silence des bois.
Une reine qui les conduit De tant de merveilles reluit Que le Soleil qui tout surmonte, Quand même il est plus flamboyant, S'il était sensible à la honte, Se cacherait en la voyant.
Aussi le temps a beau courir, Je la ferai toujours fleurir Au rang des choses éternelles : Et non moins que les immortels, Tant que mon dos aura des ailes, Son image aura des autels.
Grand roi faites-leur bon accueil : Louez leur magnanime orgueil Que vous seul avez fait ployable : Et vous acquérez sagement Afin de me rendre croyable La faveur de leur jugement.
Jusqu'ici vos faits glorieux Peuvent avoir des envieux : Mais quelles âmes si farouches Oseront douter de ma foi, Quand on verra leurs belles bouches Les raconter avecque moi ?