" Monarque redouté qui regnes sur les Ombres, Je ne suis pas venu dessus ces rives sombres Pour enlever ton Septre et me faire Empereur De ces lieux plains d'horreur.
En mon pieux dessein je n'ay point d'autres armes Que les gemissemens, les souspirs et les larmes, Avec tous les ennuys dont peut estre chargé Un Amant affligé.
... Amour importuné de mes plaintes funebres M'esclairant de sa flame à travers des tenebres, Par ton secret avis m'a fait venir icy Te conter mon soucy.
Tu cognois le pouvoir de sa secrette flame ; Si le bruit n'est menteur, elle embrasa ton ame Lorsque dans la Sicile, un Miracle des Cieux Parut devant tes yeux.
On dit qu'en observant sa grace nompareille, Tu frémis dans ton char d'amour et de merveille Et que tu n'as ravy cette jeune Beauté Qu'apres l'avoir esté.
S'il te souvient encor de ces douces atteintes, Pren pitié de mes maux, pren pitié de mes plaintes Et fay bien tost cesser avecque mes douleurs, Mes soûpirs et mes pleurs.
Je t'en viens conjurer par ton Palais qui fume Par le nytre embrasé, le souffre et le bitume De ces fleuves bruslans et de ces noirs Palus Qu'on ne repasse plus.
Par les trois noires Soeurs, ces Compagnes cruelles Qui portent l'espouvente et l'horreur avec elles ; Et qui tiennent tousjours leurs cheveux herissez D'Aspics entrelacez.
Par l'auguste longueur de ton poil qui grisonne, Par l'esclat incertain de ta rouge Couronne Et par la Majesté du vieux Sceptre de fer Dont tu regis l'Enfer... "