Amarille en se regardant Pour se conseiller de sa grâce Met aujourd'hui des feux dans cette glace Et d'un cristal commun fait un miroir ardent.
Ainsi touché d'un soin pareil Tous les matins l'astre du monde Lorsqu'il se lève en se mirant dans l'onde Pense tout étonné voir un autre soleil.
Ainsi l'ingrat chasseur dompté Par les seuls traits de son image, Penché sur l'eau, fit le premier hommage De ses nouveaux désirs à sa propre beauté.
En ce lieu, deux hôtes des cieux Se content un sacré mystère ; Si revêtus des robes de Cythère Ce ne sont deux Amours qui se font les doux yeux.
Ces doigts agençant ces cheveux, Doux flots où ma raison se noie, Ne touchent pas un seul filet de soie Qui ne soit le sujet de plus de mille voeux.
Ô Dieux ! que de charmants appas, Que d'oeillets, de lys et de roses, Que de clartés et que d'aimables choses Amarille détruit en s'écartant d'un pas !
Si par un magique savoir On les retenait dans ce verre, Le plus grand roi qui soit dessus la terre Voudrait changer son sceptre avecque ce miroir.