Dans ce temps-là, je n'avais rien, Rien du tout dans mon escarcelle, Et ma lyre était tout mon bien ; Dans ce temps-là je n'avais rien Que de grands trous à mon pourpoint Et le coeur de ma damoiselle. Dans ce temps-là je n'avais rien, Rien du tout dans mon escarcelle.
J'allais chanter dans les manoirs La geste du vieux Charlemagne, Et, gueux d'argent, riche d'espoirs, J'allais chanter dans les manoirs Devant les dames aux yeux noirs Dont les barons faisaient compagne. J'allais chanter dans les manoirs La geste du vieux Charlemagne.
On m'aimait... j'étais adoré Car j'avais ce qu'il faut pour plaire : Le regard vif, l'air déluré ; On m'aimait... j'étais adoré Et m'étais toujours figuré Qu'on vivait d'amour et d'eau claire On m'aimait... j'étais adoré Car j'avais ce qu'il faut pour plaire.
Je payais souvent un baiser D'un rondel ou d'une ballade Lorsqu'on voulait bien me laisser, Je payais souvent un baiser Comme ça, sans jamais toucher A ma bourse toujours malade, Je payais souvent un baiser D'un rondel ou d'une ballade.
Quand ma toute belle voulait Un collier d'or aux lueurs folles Pour entourer son cou fluet, Quand ma toute belle voulait !... Je lui faisais un chapelet D'éblouissantes lucioles, Quand ma toute belle voulait Un collier d'or aux lueurs folles.
L'avenir était devant moi Comme un jardin couvert de roses Et, plus riant que pour un roi, L'avenir était devant moi... Mais, maintenant, au vieux beffroi Vont sonner mes heures moroses. L'avenir était devant moi Comme un jardin couvert de roses.
Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu Jeune pastoure et gente dame Que mes cheveux blancs tentaient peu. Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu Car je n'attends qu'un mot de Dieu Pour voir, vers lui, voler mon âme. Riche et vieux !... las ! m'ont dit adieu Jeune pastoure et gente dame !...