Quelle tempête hélas ! quel orage assez fort Pourrait bien égaler le furieux effort Qui, tout au long d'un an, pour la française terre, A fait courir l'effroi de cette horrible guerre ? Qui traînait après soi mille et mille malheurs, Pour faire à l'avenir couler cent mille pleurs ? Si la postérité veut croire en notre histoire Ce que ceux qui l'ont vue à peine peuvent croire ; Quant à moi, je ressemble à ceux qui en dormant Songent un cas étrange, et pleins d'étonnement, Ils débattent en eux, même durant leur songe ; S'il est vrai ce qui s'offre, ou bien si c'est mensonge, Avoir vu les Français, jadis si bien unis, Eux mêmes désunis, d'eux mêmes ennemis, Forcenés, insensés et d'une rage extrême Combattant leur prochain, se combattre soi même ; Avoir vu les sujets dessous un même roi, Ne sachant la plupart ni comment, ni pourquoi, Se piller, se tuer, et pour s'entredéfaire, Implorer le secours d'une gent étrangère. Je ne me pouvais bien persuader en moi Que je dusse à mes yeux ajouter tant de foi, Et ne fût que du mal les trop vives atteintes Ont trop bien fait sentir les choses n'être feintes, J'aurais pensé rêver, et serais incertain Que ce fût chose vraie, ou bien un songe vain.