Une barque non pas au grand large mais accostée sur le rivage... Est-ce Ulysse mon si beau garçon de retour de toutes ses pérégrinations ?
Et moi qui ne suis point Athéna la grande Déesse dans son Acropole au-dessus de l'Agora ? Qui ne suis point la patiente Pénélope mais qu'une humble servante du temple d'Esculape.
On me nomme Pierrette aux jolies bouclettes. Je suis d'Ithaque la fièrette patrie de ce vaillant guerrier parti à Troie que l'on nomme Ulysse aux si grands exploits.
Dans notre jeune âge nous venions tous les deux jouer à cache-cache à l'ombre du saule-laurier et c'est là qu'il m'avait volé un doux baiser. Se souvient-il encore de tous nos jeux ?
Moi Homère vieil aède qui erre à l'aveuglette et qui a jadis chanté ses exploits, j'affirme que notre héros de Troie se souvient encore de tous vos jeux et amourettes.
Pourquoi serait-il arrêté près du temple sacré avant de se diriger vers son palais pour y faire maison nette, sinon pour aller se recueillir sur la tombe de Pierrette où fleurissaient violettes et pâquerettes ?
Du rendez-vous manqué la veille de son départ pour Troie, la belle Pierrette aux jolies bouclettes s'est tenaillée les poignets et de son sang versé, elle arrosa sanguinaires et oeillets qui réchaufferont sa tombe pour qu'elle n'ait pas froid.
Son corps repose au pied du vieux saule-laurier mais son âme flotte au-dessus de l'autel du sanctuaire implorant protection pour son héros parti pour la guerre espérant le retour sain et sauf de son bien-aimé.
Moi Pierrette aux jolies bouclettes, servante du temple d'Esculape, je sais que mes prières aux Dieux ont été exaucées car même morte rien ne m’échappe et je sens les larmes d’Ulysse le grand guerrier
arroser ce plant de rosier en fleurs qu’il a planté au-dessus de ma tombe à son retour afin que jamais ne meurent les joies et les secrets de nos amours.