Tu ne me connais pas, tu ne sais qui je suis, Tu ne m'aperçois pas, le soir, quand je te suis, Quand se perd ma pensée en tes lueurs de femme, Quand je m'en vais, noyant mes sens, noyant mon âme Dans les candeurs et les fraîcheurs de ta beauté. Tes regards clairs, pareils à des matins d'été, Si chastement encor s'arrêtent sur les choses : Tu n'as jamais su voir le trouble que tu causes, Jamais tu n'as su voir, en passant devant moi, Que je m'émeus et souffre, et pâlis près de toi ! À qui donc seras-tu ? Qui boira la lumière De tes yeux ? Qui verra l'ivresse printanière De ton premier amour ? Un soir, quel bienheureux Te tiendra sur son coeur comme un oiseau peureux ? Oh ! qui déroulera ta jeune chevelure ? Qui viendra respirer, ô fleur, ton âme pure, Et par de longs baisers courant sur tes bras nus Fera passer en toi les frissons inconnus ? Et moi, qui si longtemps t'ai cherchée et rêvée, Je dois donc te quitter, lorsque je t'ai trouvée !