Ô combien est heureux qui n'est contraint de feindre
Ô combien est heureux qui n'est contraint de feindre, Ce que la vérité le contraint de penser, Et à qui le respect d'un qu'on n'ose offenser Ne peut la liberté de sa plume contraindre !
Las, pourquoi de ce noeud sens-je la mienne éteindre, Quand mes justes regrets je cuide commencer ? Et pourquoi ne se peut mon âme dispenser De ne sentir son mal ou de s'en pouvoir plaindre ?
On me donne la gêne, et si n'ose crier, On me voit tourmenter, et si n'ose prier Qu'on ait pitié de moi, O peine trop sujette !
Il n'est feu si ardent qu'un feu qui est enclos, Il n'est si fâcheux mal qu'un mal qui tient à l'os, Et n'est si grand douleur qu'une douleur muette.