La nuit la plus funeste et la plus malheureuse Qui vît jamais dissoudre une étreinte amoureuse Pliait son noir manteau, pour sortir du séjour Où l'aimable Amarante était morte d'amour, Et portait en fuyant vers sa demeure sombre Un crêpe, que son deuil avait fait de son ombre. La courrière du jours, qui vient d'un air riant Ouvrir tous les matins les portes d'Orient, Sortait demi-voilée, et contre sa coutume Paraissait ténébreuse où le soleil s'allume ; Ses yeux qui font couler des perles sur les fleurs, Pour montrer son regret ne versaient que des pleurs Et, loin du riche éclat qu'en sa pompe elle étale, On ne la vit jamais si tremblante et si pâle.
L'air était agité par les dolents Zéphirs Qui changeaient leur haleine en de tristes soupirs ; La terre souhaitait d'éternelles ténèbres Et par des sentiments langoureux et funèbres, Voulant nourrir son deuil dedans l'obscurité, Ne voyait qu'à regret la naissante clarté.
Enfin dans la douleur d'une telle aventure, Un frisson général saisissait la nature, Quand l'objet malheureux, que la rigueur du sort Touchait plus vivement en cette injuste mort, Le désolé Filinte, accablé de tristesse, Et parmi tant de trouble échappé de la presse, Sortit du lieu fatal, où je crois qu'en effet La mort même pleurait du coup qu'elle avait fait. [...]