Je suis la Journée, Vous, Amy, le jour, Qui m'a détournée Du fâcheux séjour. D'aimer la Nuit certes je ne veux point, Pource qu'à vice elle vient toute à point : Mais à vous toute être Certes je veux bien, Pource qu'en votre être Ne gît que tout bien.
Là où en ténèbres On ne peut rien voir Que choses funèbres, Qui font peur avoir, On peut de nuit encor se réjouir De leurs amours faisant amants jouir : Mais la jouissance De folle pitié N'a point de puissance Sur notre amitié,
Vu qu'elle est fondée En prospérité Sur Vertu sondée De toute équité. La nuit ne peut un meurtre déclarer, Comme le jour, qui vient à éclairer Ce que la nuit cache, Faisant mille maux, Et ne veut qu'on sache Ses tours fins, et cauts.
La nuit la paresse Nourrit, qui tant nuit : Et le jour nous dresse Au travail, qui duit. Ô heureux jour, bien te doit estimer Celle qu'ainsi as voulu allumer, Prenant toujours cure Réduire à clarté Ceux que nuit obscure Avait écartés !
Ainsi éclairée De si heureux jour, Serai assurée De plaisant séjour.