La fortune envieuse, Voyant mon jour passer, De la nuit est joyeuse Pour me faire penser Vrai ce que le Ciel dit Pour se mettre en crédit.
Mais savoir n'ai envie Des Planètes le cours Pour connaître ma vie, Ayant autre discours : Car tant que je verrai Mon jour, je ne mourrai.
Ne trouve point étrange, Si, quand ne le puis voir, Je me trouble, et me change, Tant qu'il me faut douloir Du mal, que mon coeur sent, Quand de moi est absent.
Ce que j'y suis tenue Ne me fait tant l'aimer, Que sa vertu connue Me contraint l'estimer, Par son los tant requis, Qui m'est honneur acquis.
Sa grâce accompagnée Plus qu'à nul j'ai pu voir : Par quoi pour lui suis née, D'autre je n'ai vouloir : Les Dieux pour moi l'ont mis Au bout des vrais amis.
Ô amitié bien prise, Que j'ai voulu choisir Par vraie foi promise, Qui mon coeur vint saisir, Quand honneur s'allia Au bien, qui nous lia !
Ma fortune accomplie En mon heureux séjour De plaisir fut remplie, Quand j'aperçus mon jour : Qui bien connu l'aura, Mon ami aimera.
Heureuse destinée En mon heur apparaît, Ne sachant femme née Qui peut, ne qui saurait Éviter la moitié De sa noble amitié.
D'être d'autres requise N'y veuillez point venir : Car je suis tant apprise Que j'ai pour souvenir La grandeur de son coeur Être du mien vainqueur.
Et si je n'ai la grâce Pour mériter d'avoir Ce bien, et qu'on pourchasse De le me décevoir, Ma fermeté fera Qu'il se contentera.