Souviens-toi que tu n'es que cendre Et qu'il te faut bien descendre Dans le fond d'un sépulcre noir, Où la terre te doit reprendre Et la cendre te recevoir.
Le péril te suit à la guerre, Dessus la mer, dessus la terre ; Le péril te suit en tous lieux, Et tout ce que le monde enserre Vit en péril dessous les cieux.
La moindre fièvre survenue, Qui dans tes veines continue Te viendra troubler le cerveau, Couvrira tes yeux d'une nue Et t'enverra dans le tombeau.
Des hommes la maudite vie À mille maux est asservie, Dont le moindre est assez puissant Pour arracher l'âme et la vie Hors de notre corps languissant.
Puis après la mort endurée, De ta dépouille demeurée Les membres seront sans chaleur Et ta face défigurée, Et tes deux lèvres sans couleur.
Des prêtres la triste cohorte Viendra chanter devant ta porte, Un drap de morts et un linceul Couvriront ta charogne morte, Prisonnière dans un cercueil.
Les torches luiront par la rue, Et des tiens la troupe accourue, Couverte d'un long habit noir, A ton âme mal secourue Payeront le dernier devoir.
Alors la prunelle offusquée, La langue qui s'est tant moquée, Et ta peau cendre deviendront, Et au lieu de poudre musquée, Les vers dans ton poil se tiendront.
Tout ce qui dans terre chemine De puanteur et de vermine, Mille crapauds, mille serpents, Iront sur ta morte poitrine Et dessus ton ventre rampant.
La main de ton juge équitable À ton offense détestable Sa justice fera sentir, Un grand abîme épouvantable S'entr'ouvrira pour t'engloutir.
Ton âme de nul consolée, Qui cependant sera volée Où l'on juge en dernier ressort, Toute tremblante et désolée Mourra de peine après ta mort.