Il ne veut pas dormir, mon Petit... Mon petit Ne veut pas dormir, et rit ! et tend à la lumière Le hasard agrippant et l'unité première De son geste ingénu qui ne se sait porteur Des soirs d'Hérédités, - et tend à la lumière Du grossi soleil son geste qui s'étourdit D'être du monde !...
Ta mère va, mon petit Qui te donnes à la vie ! Clore les rideaux, lourds d'une nuit en lenteur D'atomes, en lenteur de sang... Ah ! la nuit tendre Ainsi qu'une eau, tu ne sais pas ! où se détendre La trouvant quelque heure d'un être moins tourneur D'aguets, que les plus hauts midis! où se détendre La douleur de nos Yeux et de l'inassouvie Vie, l'âpre haleine !...
... Il est un seul navire (et haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Il est un seul navire à l'eau Où mon Amant est matelot...
Des tropiques du temps (et, haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Des tropiques tant loin de nous Que m'apporte mon Ami doux ?
Du soleil de la vie (et, haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Du soleil ton Amant t'apporte A en dorer toute ta porte.
Dans les palmiers d'alors (et, haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Dans les palmiers de la grande île De soleils d'or il en est mille.
Il en est qui sont verts (et, haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Rouges et verts et d'autres d'or Dans la grande île vers Timor !
Il en est plein la tête (et, haut Monte au haut mât d'où l'on voit tôt !) Et plein les Yeux de ton Ami Dont tu plaignis le lointain sort...
Il en est plein ma gorge (aidants Aidés d'étoiles, nage au port !) Et plein ma gorge et plein dedans Mon coeur De toi qui s'est gémi !...
Mais il ne veut dormir, mon Petit... Mon petit Ne veut dormir, et pleure, et tend à la lumière Qu'il sait trop ! l'implorant geste de son exil Aux ondes du néant où se désole-t-il D'errer... Or, ouvre les rideaux de nuit ! ô mère De silence, - que luise entre les doigts en voeu De vivre, le soleil vaste ! le premier Dieu...