Soulève ta paupière close Qu’effleure un songe virginal ; Je suis le spectre d’une rose Que tu portais hier au bal. Tu me pris encore emperlée Des pleurs d’argent de l’arrosoir, Et parmi la fête étoilée Tu me promenas tout le soir.
Ô toi qui de ma mort fus cause, Sans que tu puisses le chasser Toute la nuit mon spectre rose A ton chevet viendra danser. Mais ne crains rien, je ne réclame Ni messe, ni De Profundis ; Ce léger parfum est mon âme Et j’arrive du paradis.
Mon destin fut digne d’envie : Pour avoir un trépas si beau, Plus d’un aurait donné sa vie, Car j’ai ta gorge pour tombeau, Et sur l’albâtre où je repose Un poète avec un baiser Ecrivit : Ci-gît une rose Que tous les rois vont jalouser